Sujet: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule Dim 13 Aoû - 17:23
froid. hiver. cinquième clope de la journée ou peut-être six ? ou peut-être cent ? qu'est ce que cela change ?
même journée qu'hier que demain tu t'emmerdes dans ton quartier tu t'emmerdes robot automate
mais parfois quand tu vois que la neige est tombée un SOURIRE apparaîtrait presque sur ton visage
sur ton visage, ou dans ta tête. tu ne sais plus trop si ton visage se rappelle comment sourire réellement
tu te poses sur un banc allumes ton pet cinquième, sixième, ou centième.
tu as oublié.
Damaris
Sujet: Re: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule Dim 13 Aoû - 18:37
He wore black and I wore white
t'es une princesse, ici, dans ce bled de paumé, celui dont t'as si longtemps fais partie, si longtemps épousé les pleins et les creux, les larmes et les rires, les joies et les tristesses. T'es devenue une princesse, dans ces rues macabres, dont le seul espoir est celui porté par la fumée qui s'échappe des lèvres d'un camé qui t'sourit lubriquement, l'air de dire que si t'as pas de quoi le payer, il trouvera un arrangement au creux de tes hanches, au creux de ton cou, de tes lèvres, et des tes bras. Au creux de ton âme. Mais t'es trop classe pour lui, maintenant, et tout ce qu'il ose faire, tout ce qu'il ose dire, c'est un signe de tête, une exclamation. surpris. et puis tu t'en fous, t'as déjà ce qu'il faut, tu t'en tapes, maintenant que t'as le fric de l'autre con. Tu sais même pas ce que tu fous ici, pourquoi tu persistes à revenir, inlassablement dans ce quartier où t'as passé les meilleures et les pires nuits de ta vie, pire encore que de sentir la queue molle d'un vieux entre tes jambes, pire encore que celles où t'es dans ta robe guindée et où tu dois faire la petite fille sage et amoureuse, et même pires que celles roulée en boule dans des couvertures, papa qui tape maman, grand frère qui t'frappe toi pour jouer au papa, et la petite soeur qui chiale, et que rien ne calme si ce n'est une droite du frangin. et t'es devenue une princesse, et pourtant, tu reviens ici, encore et encore, là où t'as gerbé tes entrailles, là où t'as vu crever sans rien d'autres que tes yeux pour pleurer, là où on t'a ouvert le bide, enfin sans doute le bide, tu sais pas, tu t'rappelles plus, plus rien d'autre que les murs blancs quand tu t'es réveillée, et le bip-bip du moniteur, et l'infirmière qui rentre... A moins que ce ne soit pas cette fois-là, tu te souviens plus vraiment, tu confonds, tu mélanges.
tu restes chez toi, ici. T'as beau tout faire pour t'en éloigner, tu le restes, chez toi. tu connais chaque rue, tout te rappelle combien tu vivais, combien c'était fort, l'adrénaline dans tes veines, presque aussi fort que la nostalgie qui te serre le coeur quand tu vois tout ça, et qui te force à t'asseoir sur un banc, déjà occupé, mais tu sais pas si tu tiendras plus longtemps, si tu pourras marcher plus loin. Qui te force à porter à tes lèvres un préroulé que tu trimballes toujours par dizaines dans ta poche, à côté de la seringue et des flacons que tu serres très fort entre tes mains au passage. il te faut quelques bouffées il te faut regarder ce bout se consumer il te faut inspirer, encore, expirer au rythme de l’herbe qui infiltre tes poumons au rythme de tes pupilles qui se dilatent un peu de ta tête qui part en arrière de la fumée que tu recraches doucement, comme attristée de t’en séparer il te faut tout ça pour retrouver ce bout de bitume qui danse devant tes yeux, pour retrouver cette sensation de bien-être profond, qui vient plus de ton cerveau que du joint à moitié consumé entre tes lèvres d’un brun parfait. t’es chez toi, ici. et tu détestes ça.
Sujet: Re: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule Dim 13 Aoû - 19:50
une poupée s'assied à tes côtés. apparition.
pourtant elle ne t'éblouit plus elle ne te surprend plus elle ne t'intrigue plus
tu l'as reconnue plus ou moins.
à ses vêtements de marques et son maquillage de pétasse. c'est une espèce rare, ici.
ici où nike et fila ont remplacé dior et chanel ici où les maquillages ne durent pas bien longtemps. où le mascara est nettoyé par les larmes où les rouge à lèvres est nettoyé par les cris où le masque est nettoyé par la rue.
c'est la seule. la seule devenue riche du moins, en apparence. la seule devenue riche et qui pourtant revient quand même.
agacé tu lâches
"alors tu l'as trouvé le bonheur que t'as prétendu partir chercher ?"
tu repenses à la dernière fois la derniere fois qu'elle a daigné t'adresser la parole.
ici, il y en a des tas des filles comme elle. et celle-ci la seule dont l'apparition te fait tirer sur ton pet aussi vite.
Damaris
Sujet: Re: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule Dim 13 Aoû - 22:47
He wore black and I wore white
t'es loin, perdue dans tes pensées, dans tes songes qui se lient et se délient, sans raison, sans but, sans sens. t'es loin, et t'es presque bien, comme si tu te retrouvais enfin dans cet état de semi-conscience où tu sais plus trop bien à quoi ça rime de vivre, mais où tu sais que ça vaut le coup. qu'ils valent le coup...
mais ils ne sont plus. Ils t'ont recueilli, ils t'ont fait survivre, et ils ont tous crevés. Ou bien alors ils sont partis, loin, et personne n'a jamais tenté de les chercher, parce que quand l'un des vôtres disparaît, sans raison, alors c'est pire que s'il était mort. alors faut le laisser, l'oublier.
t’es partie, toi aussi. t’as pas vraiment dit au revoir, tu t’éloignais, de toutes façons, depuis que tu te laissais tringler à droite à gauche, forcément, ça plaisait pas, ils voulaient que tu payes, pour eux tous, que ton corps serve à quelque chose de moins égoïste, et tu voulais pas, et ils criaient, et tu criais, et tu t’éloignais.
et puis un jour t’es partie, comme ça, tu leur as balancé d’aller se faire foutre, que tu allais être heureuse, là-bas, de l’autre côté, que t’allais franchir cette frontière, faire ce qu’aucun d’entre eux n’aurait jamais les couilles de faire, que t’allais arrêter de crever la dalle et la misère pour une petite piqûre d’héro, et qu’ils pouvaient bien aller se faire enculer.
et puis tu sais même pas si tu l’pensais sur le coup, si t’y croyais à l’époque, au bonheur, sans doute pas, tu leur as plus lâché ça pour leur foutre la rage, parce qu’au fond dans ce monde de merde, peu importe si t’es heureux u pas, tout ce qui compte c’est que les autres le croit. mais ca reste plutôt con d’être parti comme ça, parce que là-bas, de l’autre coté, t’es pas heureuse, pas plus qu’ici, certes pas moins non plus, mais t’es pas chez toi, et à cause de ça, t’es plus chez toi ici non plus, t’as plus de chez toi, poupée.
t’es loin, perdue dans tes pensées sans queue ni tête, lorsque c’est une voix qui te sort de ta torpeur, une voix, sa voix. "alors, tu l'as trouvé le bonheur que t'as prétendu partir chercher ?" tu relèves pas la tête, t’as pas besoin de ça pour voir ses cheveux châtains blonds en batailles, son regard qui te transperce, son visage doux, presque trop doux pour l’endroit aurais-tu dit si tu ne le connaissais pas, et tu te demandes ce que tu as bien pu faire de si mal pour que ça tombe sur lui, sur toi, sur ces pétards que vous êtes en train de consumer, sur cette journée, et sur ce banc qui n’a rien demandé.
t’inspires une grande bouffée, plus pour reprendre contenance et te donner le temps que par réel besoin, tu te crâmes presque les doigts, ils te le disaient toujours, tu fumes vite, trop vite ma dam’, tu gâches, tu savoures pas et tu te crâmes, et tu l’as pas perdue, cette sale manie d’enfiler les taffes sans respirer entre, de n’inspirer qu’au travers de ce tube plein de mort, et de douceur, cette sale manie de tirer tellement vite, et tellement fort qu’en deux secondes, sans regarder, la flamme s’étend jusqu’à ta peau, et tu grommelles en sursautant, et heureusement que t’as pas non plus perdu le réflexe de le garder dans ta main, ton joint. en fait, t’as rien perdu. c’est comme si tu n’étais jamais parti, t’as rien perdu, t’as rien gagné.
"depuis quand on y croit, nous, au bonheur, atlas ? de l'autre côté, ici, c'est toujours pareil, toujours les mêmes robots de merde en guise d'humain, toujours la même merde en guise de vie.", murmures-tu, doucereuse, avant d'inspirer profondément une dernière taffe, et de laisser choir à tes pieds le papier plié, seul vestige de ce qui te fait légèrement tournoyer.
tu redresses la tête, plante tes yeux dans les siens.
Sujet: Re: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule Dim 13 Aoû - 23:15
elle enfile son pet aussi vite que tu enfiles le tien
concours
qui se détruira en premier qui toussera en premier qui se fera arrêter casser la gueule voler en premier
peut-être que, malheureusement vous vous valez bien.
"j'sais bien. j't'ai jamais cru, de toute façon.
"tu mens mal quand tu parles du bonheur ou dce genre de conneries."
la façon dont elle parle d'ici de chez toi de chez vous elle résonne en toi.
de l'autre côté
tu t'es toujours cru du bon côté.
celui qui tape pas celui qui encaisse celui qui vole pas celui qui prend peur celui qui vend pas celui qui achète celui qui court pas celui qu'on arrête.
celui qui vit. pas celui qu'on enchaîne qu'on force à travailler payer des factures métro boulot dodo
t'es libre, du moins, tu prétends l'être.
mais le jour où tu veux te barrer, te barrer d'ici, t'as vraiment cru pouvoir échapper a tout ça d'un claquement de doigts ?
ça arrive pas pas dans la réalité.
t'es bloqué ici alors vas y mens atlas. mens. clame que t'es ici chez toi clame que tu t'y plais clame que c'est faux que tu piétine pas la même merde chaque jour.
clame ces mensonges.
"j'suis toujours mieux ici. mieux ici qu'ailleurs."
ses yeux dans les tiens tu ne cherches même pas à être crédible.
elle ne le cherchait pas non plus, lorsqu'elle est partie
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Sujet: Re: Datlas / sur le bitume l'engrenage se déroule